samedi 28 septembre 2013

VICTOR JARA : DES OBSÈQUES EN ATTENTE DE JUSTICE

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Jeudi et vendredi, la fondation Victor Jara a monté une scène ouverte sur la Place Brésil, au cœur de Santiago et en face de ses bureaux, pour inviter tous les Chiliens à venir rendre hommage par un poème, une chanson, quelques mots à l’icône de la musique folklorique, connu dans toute l’Amérique latine. « C’est un personnage important dans l’histoire de notre pays», souligne Tiarée, vêtue de son uniforme scolaire. Cette jeune fille aux grands yeux noirs n’a pas même connu la dictature, mais Victor reste pour elle « un symbole de la lutte sociale », dont elle écoute les chansons le soir après les cours. « C’est comme ça qu’il aurait voulu ses funérailles », souligne-t-elle avec assurance, « le peuple participant».

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C’EST À VOIX BASSE OU EN SILENCE QU’ON REND UN DERNIER HOMMAGE AU CERCUEIL DU CHANTEUR-COMPOSITEUR, RECOUVERT DE SON PONCHO ROUGE ET NOIR.  JOAN TURNER LA VEUVE DE VICTOR JARA ER MICHELLE BACHELET


Le cercueil recouvert du poncho

Les portes de la fondation s’ouvrent sur la place. A l’intérieur, dans une salle sombre recouverte de peintures et de couronnes de fleurs, dominée par un grand drapeau chilien fait de vêtements cousus, c’est à voix basse ou en silence qu’on rend un dernier hommage au cercueil du chanteur-compositeur, recouvert de son poncho rouge et noir. En file indienne, les gens, venus en famille, déposent un œillet rouge ou touchent simplement le bois du cercueil, le même que celui dans lequel il fut enterré en 1973, rénové par les soins d’une des filles du chanteur. Beaucoup ont les yeux brillants de larmes, l’émotion est palpable.

« Le premier enterrement de Victor Jara, le 18 septembre 1973, s’est déroulé presque dans la clandestinité », rappelle Gloria König, directrice de la fondation Victor Jara. « C’est grâce à un jeune, un fonctionnaire du registre civil qui a reconnu Victor Jara à la morgue, que son corps n’a pas été lancé dans une fosse commune et que Victor n’est pas devenu un des disparus du Chili sous la dictature. » Ce jeune homme a réussi à joindre Joan Turner et c’est à trois, sans fleurs ni chants, qu’ils l’ont enterré.

Si aujourd’hui, les restes de Victor Jara sont de nouveau enterrés, c’est parce que le juge Juan Fuentes Belmar, en charge de faire la lumière sur l’assassinat du militant communiste symbole de l’Union populaire de Salvador Allende, a ordonné l’exhumation de son corps en juin dernier. Elle a permis non seulement d’authentifier ses restes, grâce à des prélèvements ADN, mais de confirmer les tortures qu’a souffert le chanteur avant d’être criblé de 44 balles.

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LA TOMBE TRÈS FLEURIE, PAR DES ADMIRATEURS ET DES ANONYMES. PARMI LES PREMIÈRES VICTIMES, VICTOR JARA, LE CHANTEUR POPULAIRE ENGAGÉ LE PLUS EN VUE DE SON ÉPOQUE, FIGURE INCONTOURNABLE AU CHILI. PHOTO EFE 


Arrêté, torturé et tué 

Le 11 septembre 1973, jour du coup d’État fomenté par le commandant en chef de l’armée de terre Augusto Pinochet qui renverse le président Salvador Allende, Victor Jara allait chanter à l’Université technique. Il est arrêté, emmené au Stade Chili, converti en un immense centre de détention et de tortures où 3 000 personnes attendent, sans comprendre, un futur incertain.

Un officier particulièrement cruel, surnommé « le Prince », pour sa voix impérieuse, ses cheveux et ses yeux clairs, aurait ordonné les tortures, selon des anciens compagnons de douleur de Victor Jara. C’est lui qui aurait tiré le premier coup de feu dans le crâne du chanteur, en jouant à la roulette russe. « J’ai la ferme conviction que les assassins de Victor Jara tant matériels qu’intellectuels sont identifiés presque à 100 %, martèle l’avocat de la famille Cristian Cruz. Celui qu’on surnommait ' le Prince ' a un prénom et un nom. Et ils sont mentionnés dans le dossier que nous avons fourni au juge. »

Pourtant, le juge n’a jusqu’ici mis en examen que deux personnes. L’une d’elle est morte. L’ancien appelé au service militaire, José Paredes, qui avait d’abord avoué être l’auteur de coups de feu, dément aujourd’hui et demande sa relaxe. Le juge Juan Fuentes Belmar avait tenté de classer l’affaire sans prononcer aucune condamnation il y a un an et demi.

La famille de Victor Jara et les centaines de Chiliens qui accompagnent le cortège funéraire et festif du chanteur, dans son dernier voyage, réclament que justice soit faite, et que cesse l’impunité.

40 ANS APRÈS L’ASSASSINAT DU CHANTEUR VICTOR JARA, DES VOIX RÉCLAMENT TOUJOURS JUSTICE



LE CHANTEUR VICTOR JARA
« Ils l’ont torturé, humilié, et criblé de balles, mais ils ignoraient que sa voix était immortelle. Le chant courageux de Victor Jara sera toujours présent. Nous devons nous souvenir de Victor Jara, pour ce qu’il représentait, mais aussi parce que ses assassins sont toujours en liberté », a déclaré Manouchehri.

Pour Daniel Melo, « l’assassinat de Victor Jara fut l’un des crimes les plus cruels et les plus lâches de la dictature militaire d’Augusto Pinochet ».

La veuve du chanteur, Joan Jara, a souligné l’héritage artistique et social de Victor Jara, qu’elle a qualifié comme un symbole de valeurs, ce qui explique que nombreux sont ceux qui se souviennent de lui avec affection et admiration, aussi bien au Chili que dans le monde.

« J’en suis très reconnaissante. Cela ne peut pas être au nom de Victor, mais je le ressens ainsi. Avec le souvenir de Victor, je vous remercie pour le magnifique travail que vous avez réalisé avec tant d’amour. Merci infiniment », a déclaré l’ancienne chorégraphe britannique lors de l’inauguration d’une exposition en hommage à Victor Jara, composée de plusieurs peintures murales au cimetière où fut découvert le cadavre de son époux, avec trois autres personnes.

Les activités à la mémoire du chanteur se sont achevées par un concert qui a réuni plusieurs groupes musicaux.

À la suite du coup d’État du 11 septembre 1973, l’université technique d’État fut encerclée par les militaires qui occupèrent les bâtiments et arrêtèrent les étudiants et les professeurs, qui furent conduits au Stade Chile transformé en centre de torture et de mort.

Parmi les professeurs faits prisonniers se trouvait Victor Jara. Lorsque le chanteur fut reconnu par les militaires, il fut frappé brutalement, les doigts de sa main gauche coupés à la hache, puis, alors qu’il s’était relevé pour chanter, il fut fauché par une rafale de mitraillette.

« Ah mon chant comme tu es amer/quand je dois chanter l’horreur/ l’horreur que je vis/ l’horreur que je meurs/ l’horreur de me voir parmi tous ces gens/en ces moments d’infini/ où le silence et le cri/ sont les douleurs de ce chant. »

C’est ainsi que Victor Jara décrivait l’horreur de ce qui se passait dans le Stade Chile, dans un poème écrit alors qu’il était enfermé avec 5 000 personnes.

40 ans après son assassinat, sa famille poursuit la bataille judiciaire afin que tous les coupables de ce crime soient enfin assis sur le banc des accusés.

Récemment, une plainte contre Barrientos a été déposée auprès du Tribunal fédéral de Jacksonville, en Floride, demandant son extradition pour qu’il soit jugé pour l’assassinat de Victor Jara – qui aurait eu 81 ans le 28 septembre.


La dernière ligne droite de cette bataille judiciaire a commencé en décembre 2012, avec l’inculpation, par le juge de la Cour d’appel de Santiago, Miguel Vazquez, de huit anciens officiers pour avoir été complices et auteurs de l’assassinat de Victor Jara.

Outre Barrientos, ont été inculpés Roberto Souper, Raul Jofré, Edwin Dimter Bianchi, Nelson Hasse Mazzei, Luis Bethke Wulf et Jorge Eduardo Smith.

Le juge a placé en détention le reste du groupe au 1er Bataillon de police militaire et a demandé l’arrestation internationale de Barientos, sans effet jusqu’à aujourd’hui.

Les anciens militaires résidant au Chili ont été arrêtés, puis placés en liberté conditionnelle jusqu’au jour du procès. (PL)


mercredi 18 septembre 2013

CHILI : HOMMAGE AU CHANTEUR VICTOR JARA, 40 ANS APRÈS SON ASSASSINAT PAR LA DICTATURE

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VICTOR JARA LORS DE LA DERNIÈRE MARCHE DE L'UNITÉ POPULAIRE, LE 4 SEPTEMBRE 1973 À SANTIAGO DU CHILI. PHOTO MARCELO MONTECINO CHEZ FLICKR

Torturé et assassiné à 40 ans par la dictature de Pinochet

Membre du Parti communiste chilien, le chanteur-compositeur, auteur de chansons emblématiques comme « Te recuerdo Amanda »  ou « El derecho de vivir en paz » , était l'un des soutiens de l'Unité Populaire et du président Salvador Allende. « Il avait des hématomes sur le visage, il était pâle et très faible. Il avait le regard perdu » , se souvient un de ses compagnons de détention, le journaliste Sergio Gutierrez, dans une interview à un journal chilien. « Regarde mes mains... regarde mes mains... ils me les ont écrasées pour que plus jamais je ne joue de la guitare » , tels sont les derniers mots adressés par le chanteur au journaliste. En décembre 2009, des milliers de Chiliens avaient accompagné les obsèques officielles du chanteur, mort à 40 ans, qui avait été inhumé quasiment clandestinement en 1973.






Spectacles et rassemblements

Plusieurs hommages ont été rendus à Victor Jara ces jours dernier, à l'occasion du 40ème anniversaire du coup d'État. Plusieurs spectacles autour de sa vie et de ses chansons ont été donnés dans la capitale chilienne. Dimanche, sa famille et ses admirateurs se sont retrouvés au cimetière de Santiago où son corps avait été retrouvé et où doit se construire un monument à sa mémoire.

La semaine dernière, le chanteur américain Bruce Springsteen avait rendu un vibrant hommage à Jara dans un concert à guichets fermés à Santiago. L'extradition d'un ancien officier de la dictature qui vit aujourd'hui en Floride, mis en cause dans le meurtre du chanteur, a été sollicitée récemment par la justice chilienne. Entre 1973 et 1990, plus de 3.000 personnes sont mortes ou ont disparu sous la dictature d'Augusto Pinochet, selon les organisations de défense des droits de l'homme.

jeudi 5 septembre 2013

NÎMES : LE NÎMOIS HÉCTOR HERRERA PERSONNAGE CLÉ D'UN DOCUMENTAIRE



Ce 52 minutes conte l'assassinat de cet artiste au travers de l'acte de résistance d'un jeune fonctionnaire chilien Hector Herrera, réfugié politique installé à Nîmes depuis 1987.

Il fait sortir de la morgue le corps de l'artiste

Le 18 septembre 1973, une semaine après le coup d'état du général Pinochet, ce jeune fonctionnaire de 23 ans, trompant la vigilance de la junte militaire, fait sortir le corps de l'artiste de la morgue de Santiago du Chili et secrètement, en compagnie de la femme de ce dernier, procède à son enterrement au cimetière général de la ville.

Il témoigne devant la Haute cour du Chili en 2009

Contraint à l'exil en 1976, il témoignera en qualité de dernier témoin direct en 2009 devant la haute cour du Chili pour faire toute la lumière sur cette page rouge sang de l'histoire Chilienne.

Diffusion sur France 3 Languedoc-Roussillon le samedi 14 septembre 2013 à 15 h 20.